Location saisonnière : la bonne recette immobilière

Accueillant à bien des égards, le département de la Dordogne sait recevoir avec ses locations saisonnières. L'activité de loueur en meublé montre que de nombreux propriétaires proposent des adresses de qualité ! La prise en compte de la réglementation y contribue comme en témoignent Laetitia LEO, Maylis BAUCHIERO, Nyrine BOULANGER et Laurent PEYBERNES, notaires en Dordogne.
En quoi consiste la location saisonnière ?
Laetitia LEO : Définie par la loi Hoguet du 2 janvier 1970 (article 1-1) cette activité correspond à " la location d'un immeuble conclue pour une durée maximale et non renouvelable de 90 jours consécutifs ". Elle est destinée à une clientèle de passage et ne constitue pas la résidence principale du locataire. Le Code du tourisme, (article L. 211-4) soumet les locations meublées saisonnières aux mêmes obligations que celles imposées aux agents de tourisme. L'article L. 324-1-1 précise que les meublés de tourisme doivent être déclarés et peuvent être classés. Il convient de distinguer la location saisonnière de la location meublée de résidence principale, qui est soumise à la loi ALUR du 24 mars 2014 et régie par les articles L. 632-1 et suivants du Code de la construction et de l'habitation.
Pourquoi faut-il s'intéresser à cette activité ?
Maylis BAUCHIERO : Riche en patrimoine historique et en paysages naturels, la Dordogne constitue une destination touristique prisée. Bien que florissante, l'activité de location saisonnière est strictement encadrée avec des règles applicables en Dordogne au plan administratif, fiscal, contractuel et locatif. Avec de nombreux avantages, tant pour les propriétaires que pour l'économie locale, la location saisonnière profite de l'attractivité de la Dordogne avec ses sites emblématiques : Sarlat, Lascaux, Périgueux, Brantôme… La légende veut que 1001 châteaux parsèment la Dordogne ! Le foie gras, les truffes, les vins de Bergerac en font un terroir de la gastronomie. Sans oublier les balades en forêt, les activités en rivière qui réservent un cadre préservé. Avec un afflux constant de touristes, la demande en hébergements saisonniers est forte pendant la haute saison estivale.
Contrairement à d'autres régions touristiques comme la Côte d'Azur ou Paris, les prix de l'immobilier en Dordogne restent abordables, permettant un retour sur investissement plus rapide.
Pas étonnant que les locations saisonnières dynamisent l'économie locale et bénéficient aux restaurants et commerces, aux activités touristiques et culturelles, aux artisans et producteurs locaux. Dès lors, la location saisonnière en Dordogne permet de combiner rentabilité et avantages fiscaux. Cependant, il convient de respecter certaines règles pour la location saisonnière en Dordogne.
Quelle durée et quels types de location s'appliquent ?
Nyrine BOULANGER : La période de location saisonnière peut varier selon l'endroit et les usages locaux. À défaut, le bail peut être requalifié et se voir appliquer les règles d'ordre public du statut des baux d'habitation de la loi du 6 juillet 1989. Il peut aussi s'agir de dispositions impératives des locations meublées occupées à titre de résidence principale. La location saisonnière vaut pour une location d'immeuble d'une durée maximale et non renouvelable de 90 jours consécutifs. Les meublés de tourisme s'apparentent à des villas, appartements ou studios meublés, à usage exclusif d'une clientèle de passage qui y effectue un séjour à la journée, à la semaine ou au mois. Elle diffère de celle des chambres d'hôte qui consiste en la location de chambres meublées chez l'habitant en vue d'accueillir des touristes, à titre onéreux pour une ou plusieurs nuits, assorties de prestations comme la fourniture de linge de lit et le petit-déjeuner.
Le classement d'un meublé selon 5 catégories - allant de 1 à 5 étoiles - reste facultatif. Il constitue toutefois un outil de commercialisation et de visibilité pour le loueur et permet également de bénéficier d'un abattement spécifique sur les revenus locatifs. Dans ce cas, le loueur doit s'adresser à l'organisme de son choix sur www.classement.atout-france.fr. pour obtenir une accréditation.
Quelles sont Les obligations préalables pour louer ?
Laurent PEYBERNES : le loueur déclare exercer son activité en qualité de loueur meublé professionnel ou non professionnel (distinction ci-après). Dans les 15 jours qui suivent le début de son activité, il souscrit une déclaration de création d'entreprise sur le guichet des formalités des entreprises (GFE) sur les sites : formalites.entreprises.gouv.fr ou procedures.inpi.fr.
Cette démarche permet de déclarer le début d'activité, d'obtenir un numéro SIRET et d'indiquer le régime d'imposition choisi.
S'ajoute une déclaration d'activité en mairie au moyen du formulaire Cerfa n°14004, à moins qu'il ne s'agisse de la résidence principale du loueur. Concernant la résidence principale, celle-ci ne nécessite pas de formalité de déclaration préalable. Toutefois, la location ne peut excéder 120 jours par an, sauf exception (obligation professionnelle, raisons de santé ou force majeure). Depuis 2025, les maires peuvent limiter à 90 jours par an la durée maximale de location touristique de la résidence principale. Au plus tard le 20 mai 2026, toutes les locations de meublés touristiques, y compris de la résidence principale, devront faire l'objet d'une déclaration. Par ailleurs, certaines communes peuvent exiger une déclaration de changement d'usage du bien avant la mise en location, mais la Dordogne n'est pas concernée par cette formalité. Si le bien loué est un lot de copropriété, il convient de s'assurer au préalable que le règlement n'interdit pas la location de meublé touristique. Depuis le 1er janvier 2025, tout loueur de meublés de tourisme doit en informer le syndic de l'immeuble. Les règlements de copropriété établis depuis le 21 novembre 2024 doivent mentionner de manière explicite l'autorisation ou l'interdiction de location de meublés de tourisme au sein de l'immeuble. Le bailleur doit être assuré pour le bien en qualité de propriétaire non occupant et s'assurer contre les risques de sinistres causés par les locataires ou exiger que le client lui délivre une attestation d'assurance responsabilité civile spéciale villégiature, mais cela est plus contraignant. De plus, à compter du 1er janvier 2034, les meublés de tourisme qui ne constituent pas la résidence principale du loueur devront respecter les mêmes niveaux de performances énergétiques que les logements loués de façon pérenne et disposer d'un DPE.
Qu'en est-il des obligations locatives ?
Laetitia LEO : Tout contrat de location saisonnière doit revêtir la forme écrite et contenir l'indication du prix demandé ainsi qu'un état descriptif des lieux. Il doit être établi en deux exemplaires destinés à chacune des parties. Il doit comporter l'identité du bailleur et du locataire, adresse des locaux loués, durée de la location, dates et heures d'arrivée et de départ, prix de la location et montant des charges, ainsi que les modalités de leur paiement. S'ajoute la mention de l'avance à régler, la caution à payer et le mode de restitution. Il peut éventuellement inclure l'assurance exigée du client et le nombre maximum d'occupants autorisé.
Aussi, il est préférable d'établir dès l'entrée un état des lieux ainsi qu'un inventaire détaillé du mobilier et des objets mis à la disposition du locataire. Ces deux documents doivent être signés par les parties, datés et établis en double exemplaire. Un nouvel état des lieux et un nouvel inventaire seront établis en fin de séjour. Les tarifs des locations saisonnières sont fixés librement. Le solde du loyer non payable d'avance peut être exigé au moment de la remise des clés. Les charges peuvent être comprises dans le prix ou fixées de manière forfaitaire. Le bailleur est en droit de demander un dépôt de garantie ou une caution à restituer au locataire lors de la sortie des lieux si aucune détérioration n'est constatée. En cas échéant, la restitution s'effectue déduction faite de ces frais engendrés dans un délai raisonnable. Le locataire peut demander toutes pièces justificatives. Dès la réservation, le propriétaire est en droit de demander au locataire le versement d'une somme qui correspond à une partie du prix versée d'avance.
S'il s'agit d'arrhes (C. civ. art. 1590 ; C. consom. art. L 214-1), le futur " locataire " les perdra s'il se désiste et le propriétaire devra verser le double s'il renonce à louer. Si le versement est qualifié d'acompte, le locataire qui annule sa réservation peut être tenu de verser l'intégralité du prix si le logement n'a pas pu être reloué. Si le propriétaire renonce à louer, des dommages-intérêts peuvent lui être réclamés pour réparer le préjudice moral ou financier subi par le locataire.
Lorsque la commune a institué une taxe de séjour, le loueur doit la percevoir pour chaque personne majeure et la reverser à la mairie. Pour le client autre que de nationalité française (qu'il soit ressortissant ou non de l'Union Européenne), le loueur est tenu de lui faire remplir une " fiche individuelle de police " (à conserver 6 mois). Le loueur doit la transmettre seulement si les services de police ou de gendarmerie l'exigent.
Quels avantages financiers peut-on retirer ?
Maylis BAUCHIERO : Il convient de noter qu'il existe deux statuts distincts. Le loueur en meublé professionnel cumule les deux critères suivants avec des revenus locatifs supérieurs à 23 000 € par an, qui dépassent les autres revenus totaux du foyer fiscal. Avec des revenus imposés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, la cession de l'immeuble est assujettie à l'impôt sur la plus-value professionnelle.
A contrario, dès lors qu'un de ces deux critères n'est pas rempli, le statut du propriétaire bailleur sera celui de loueur en meublé non professionnel également taxé dans la catégorie des BIC avec possibilité de bénéficier du régime micro-BIC. Précédemment, l'abattement applicable était de 50 % voire de 71 % pour un meublé " classé ". Revus à la baisse par la loi de finances 2025, ces abattements s'élèvent désormais à 30 % (alignés sur la location nue) voire 50 % pour les meublés classés. La plus-value éventuellement générée lors de la revente du bien est imposée.
Il est toujours possible pour le loueur en meublé non professionnel d'opter pour le régime réel, qui renforce alors l'avantage fiscal avec la possibilité de déduire tant les charges réelles (intérêts d'emprunt, frais de syndic, travaux, taxe foncière..) qu'une fraction de la valeur du bien chaque année sous forme d'amortissement. La déduction de cet amortissement peut annuler en tout ou partie l'imposition sur les revenus générés par le bien. La Loi de Finances 2025 est venue contrebalancer cet avantage en imposant la réintégration des amortissements pratiqués depuis l'acquisition du bien dans le calcul des plus-values pour les loueurs en meublé non professionnels. De plus, cette option au réel nécessite la tenue d'une comptabilité et donc le recours à un expert-comptable.
D'un point de vue financier, les loyers retirés de la location saisonnière sont en général supérieurs à ceux attendus dans le cadre d'une location nue à l'année. Les risques liés aux loyers impayés sont aussi écartés. Si les avantages financiers et fiscaux demeurent, les dernières réformes fiscales tendent à lisser les deux régimes que sont la location nue et la location meublée afin d'augmenter l'offre locative.
Que conseillez-vous pour le patrimoine du couple ?
Nyrine BOULANGER : Plusieurs questions se posent lorsqu'un couple décide d'acquérir un bien immobilier ensemble, notamment le financement, la transmission, la séparation. Le sort du bien dépendra notamment du mode de conjugalité du couple. Trois modes de conjugalité cohabitent, à savoir le concubinage, le pacte civil de solidarité (PACS) et le mariage. La protection du survivant du couple diffère selon le mode d'union choisi. Alors que l'institution du mariage offre la protection la plus optimale en droit interne, le concubinage quant à lui représente la forme d'union la plus libre, n'emporte guère d'effets juridiques et ne procure aucune protection particulière. Le PACS créé en 1999 concurrence sur certains points le régime protecteur offert par le mariage, sans jamais l'égaler.
Quid de l'achat en couple ?
Laurent PEYBERNES : En matière de concubinage, et en l'absence de toute convention d'indivision, le bien immobilier acquis par les concubins relèvera du régime légal de l'indivision édicté aux articles 815 et suivants du Code civil. Les proportions d'acquisition, c'est-à-dire les quotités des droits de propriété de chaque concubin seront précisées dans l'acte et reflèteront en principe le financement de chacun dans le projet. À défaut, l'acquisition serait réputée faite par parts égales. Précision importante, il n'est pas rare que les concubins demandent que la proportion de propriété de chacun soit de moitié, bien que le financement ne soit pas égal, car ils considèrent que le " rééquilibrage " se fera en cours de vie commune. Sur ce point, l'administration fiscale peut invoquer l'existence d'une donation indirecte et soumettre la quotité donnée aux droits de mutations à titre gratuit.
et pour l'acquisition entre partenaires de PACS ?
Laetitia LEO : En ce qui concerne les partenaires " pacsés ", il existe 2 régimes : la séparation de biens et l'indivision. À défaut, la séparation de biens s'applique, et ce depuis la réforme mise en place par la loi du 23 juin 2006. Chacun des partenaires conserve l'administration, la jouissance et la libre disposition de ses biens personnels (C. civ., art. 515-5, al.1). Ainsi, un partenaire séparé de biens pourra devenir seul propriétaire d'un bien immobilier. Les partenaires peuvent néanmoins, comme les époux séparés de biens, acquérir ensemble des biens indivisément entre eux, ils seront donc soumis au régime de l'indivision de droit commun. L'avantage du régime de la séparation de biens est que chacun des partenaires conserve la propriété de ses biens et par conséquent en a l'administration, la jouissance et la libre disposition. Les partenaires ont aussi la possibilité de choisir le régime de l'indivision pour leur PACS qui les place dans une situation proche de celle des époux mariés sous le régime légal de la communauté de biens réduite aux acquêts. L'article 515-5-2 du Code civil énumère les biens qui demeurent la propriété exclusive des partenaires. Il est admis que les biens reçus par donation ou succession demeurent personnels. S'agissant des autres biens acquis pendant le pacte, ils sont réputés indivis par moitié entre les partenaires, qu'ils soient financés par l'un ou l'autre des partenaires. Il n'y a pas de recours entre eux au titre d'une contribution inégale (C. civ., art. 515-5-1).
Quels sont les avantages pour les couples mariés ?
Maylis BAUCHIERO : Les couples mariés ont le choix entre différents régimes matrimoniaux. Le régime légal s'impose en l'absence de contrat de mariage, avec la communauté des biens réduite aux acquêts depuis le 1er février 1966. Ainsi, une personne mariée sous le régime de la communauté ne pourra pas acheter un bien en son seul nom, sauf s'il l'acquiert en emploi ou remploi de fonds propres (reçus par succession ou donation). Chaque époux pourra administrer seul et disposer des biens communs sauf pour les actes les plus graves (vente) qui nécessiteront l'accord des deux époux. Le régime de la séparation n'entraîne qu'une association patrimoniale minimale entre les époux. Chacun d'eux aura la libre disposition de ses biens. Enfin, le régime de la participation aux acquêts découle de la technique séparatiste et communautaire. Sa portée diffère dans le temps, séparatiste pendant le cours du régime, il devient communautaire à sa dissolution.
Quid de la protection du survivant du couple ?
Nyrine BOULANGER : En concubinage, il n'est pas prévu de protection du lieu de vie partagé par le couple. De plus, le concubin n'étant pas héritier, il n'a pas vocation à rester dans le logement du défunt. Bien qu'il puisse être désigné héritier par testament, la fiscalité applicable serait prohibitive car les droits s'élèvent à 60 % sur la part nette taxable pour le concubin.
La situation du partenaire de Pacs est plus protectrice que celle du concubin. Au plan fiscal, depuis le 22 août 2007, la loi TEPA les a exemptés de droits de succession, au même titre qu'un conjoint survivant comme des mariés. En outre, la loi a prévu pour le partenaire survivant le bénéfice du droit temporaire au logement. Il s'agit d'un droit de jouissance gratuit du logement que les partenaires occupaient pendant 12 mois. Ce droit temporaire s'exerce au profit du partenaire survivant dans les mêmes conditions que pour le conjoint. Toutefois, à l'inverse du mariage, le défunt peut priver le partenaire de ce droit par testament.
La suprématie du mariage repose sur la protection conférée au survivant du couple marié. En l'absence d'enfant et d'ascendant, le conjoint survivant recueille l'intégralité de la succession, même en présence de frères et sœurs du défunt. En présence d'enfant commun du couple, et sauf volonté contraire, le conjoint recueille à son choix toute la succession en usufruit ou le 1/4 en pleine propriété.
Ce droit d'usufruit lui permet notamment de conserver la jouissance de la maison, sans qu'aucun enfant ne puisse s'y opposer. Le conjoint est par conséquent assuré de rester chez lui au décès de son époux. Une nuance toutefois, en présence d'enfant non commun, le conjoint survivant perd son droit en usufruit et ne peut prétendre qu'au quart de la succession en pleine propriété (sauf si une donation entre époux est établie). Malgré la perte de l'option en usufruit sur les biens, le conjoint survivant non divorcé a le droit de rester gratuitement dans les lieux pendant un an, et bénéficier pendant la même durée de la jouissance du mobilier (droit temporaire au logement). Le conjoint survivant aussi peut bénéficier d'un droit viager au logement. À la différence du droit temporaire au logement qui n'assure qu'une simple jouissance gratuite limitée dans le temps, ce droit viager confère au conjoint un droit d'habitation et un droit d'usage sur le mobilier sa vie durant. Le mariage demeure le mode d'union le plus protecteur.
Comment profiter de l'assurance décès-invalidité ?
Laurent PEYBERNES : Lors de la souscription de son offre de prêt, l'acquéreur se voit concerné par l'assurance. Elle couvre en totalité ou pour partie les risques de décès, invalidité et incapacité de travail. En cas de survenance d'un des évènements précités, il existe 2 hypothèses de prise en charge du prêt par l'assurance :
- chaque emprunteur est assuré pour la quote-part de prêt qu'il doit rembourser eu égard aux proportions d'acquisition (exemple 50 % chacun en cas d'achat par moitié). Ici, en cas de décès, les héritiers de l'emprunteur n'auront pas à continuer à rembourser la quote-part qu'il assure puisque l'assurance soldera la quote-part du prêt due. Ainsi, le co-emprunteur survivant devra seulement continuer à payer sa part de remboursement de crédit.
- chacun des membres du couple s'assure pour 100 % du crédit. Si un des emprunteurs décède, la totalité du crédit est alors prise en charge par l'assurance. L'avantage est indéniable car non seulement les héritiers mais également le co-emprunteur seront libérés du prêt immobilier, la dette étant intégralement remboursée. Compte tenu de importance de l'assurance-décès en cas d'acquisition commune, il est conseillé aux futurs acquéreurs de prendre un rendez-vous préalable avec leur notaire.
Propos recueillis le 18/04/2025
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