Constitution de SCI : une belle équipe immobilière !

Voici les 3 lettres qui vont unir les coéquipiers d'une aventure immobilière : SCI pour société civile immobilière. Réunis pour la détention et la gestion de ce patrimoine, les associés peuvent convenir de règles du jeu avec leur notaire. Elles s'accompagnent de beaux atouts en termes d'acquisition, d'imposition et de transmission d'un bien.
Pour former une belle équipe, des acquéreurs gagnent à s'organiser au moyen de la SCI (société civile immobilière). Une stratégie gagnante qui peut être déployée grâce aux conseils des notaires, comme en témoignent Me Sophie ARPAILLANGE, Me Emmanuelle COIFFARD et Me Benoît MEURET-CADART.
Pouvez-vous nous expliquer l'objet de la SCI ?
Sophie ARPAILLANGE : Représentant une société civile, la SCI a pour but de détenir et de gérer un patrimoine immobilier, qu'il soit familial ou professionnel. Comme son nom l'indique, il s'agit d'une société civile dont l'objet n'est pas de faire du commerce.
C'est une personne juridique à part entière (personne morale) distincte des associés qui la composent. Elle doit comprendre au minimum deux associés qui reçoivent des parts sociales proportionnellement à leurs apports et désignent un gérant, choisi parmi ses associés ou non, qui va agir en son nom.
Elle répond à des règles de fonctionnement définies d'une part par la loi et d'autre part par ses statuts, notamment son objet social qui va délimiter les contours de son activité et l'étendue des pouvoirs du gérant.
Comme toutes les sociétés, la SCI doit faire l'objet d'une immatriculation au registre du commerce et des sociétés.
La SCI peut être constituée à différents stades d'un projet immobilier. Elle peut être faite au préalable et acquérir elle-même les biens mais elle peut également être créée a posteriori et reprendre un patrimoine immobilier apporté par l'un de ses associés. En résumé, on pourrait dire que la mise en société va entraîner la " dématérialisation de l'immeuble " qui sera représenté par les parts sociales détenues entre les mains des associés.
Pourquoi faut-il consulter son notaire ?
Emmanuelle COIFFARD : On compte aujourd'hui plus d'un million de sociétés civiles immobilières, soit plus de 30 % du total des sociétés, avec un rythme de création qui a tendance à s'amplifier d'année en année.
Ceci illustre l'engouement existant envers ces sociétés qui ne manquent pas de charme, légèreté de structure et souplesse de fonctionnement pouvant être leurs principales caractéristiques.
Cependant, il faut modérer son enthousiasme car la société peut présenter des risques liés à sa fiscalité, aux raisons de sa création et à la responsabilité illimitée des associés (l'associé est tenu des dettes sociales et de la contribution aux pertes sociales au-delà de son apport). Chaque situation étant particulière, il convient d'être conseillé et accompagné par son notaire pour créer une société sur mesure qui permettra d'atteindre le but recherché, tout en ménageant les intérêts des associés.
Quels avantages voyez-vous dans la SCI pour gérer un patrimoine immobilier ?
Benoît MEURET-CADART : La SCI peut permettre de s'affranchir de contraintes de l'indivision grâce aux pouvoirs donnés au gérant qui représentera la société vis-à-vis des tiers.
La plupart des actes de gestion courante relève de la responsabilité du gérant et ne requiert donc pas de majorité qualifiée des associés contrairement à l'indivision, la SCI permet une gestion plus souple.
La souplesse de la SCI, de par la rédaction sur mesure de ses statuts par le notaire, permet d'ajuster les pouvoirs du gérant selon la volonté des parties. L'unanimité n'étant requise a minima que lors de la modification des statuts.
La SCI peut permettre d'isoler les patrimoines immobiliers, cette dernière ayant la personnalité morale, elle dispose d'un patrimoine qui lui est propre. De ce fait, son patrimoine se distingue du patrimoine personnel des associés. Il faut cependant bien garder à l'esprit que les associés doivent malgré tout répondre indéfiniment du passif de la société, sauf dispositions particulières pour les associés mineurs.
La détention par le biais d'une société permet d'assurer la continuité de la gestion locative, la société restant propriétaire du bien, même en cas de changement d'associés, il n'y a pas de modifications sur le bail et les contrats en cours.
Cette société civile laisse également le choix à ses associés du mode d'imposition des bénéfices. L'impôt sur le revenu est le mode d'imposition par défaut mais les associés peuvent décider de soumettre la société à l'impôt sur les sociétés, dont le taux peut être selon le cas plus avantageux que celui de l'impôt sur les revenus. Cette option nécessite toutefois la tenue d'une comptabilité plus spécifique, avec un amortissement de l'immeuble qui va permettre une imposition moins importante mais qui génèrera une imposition sur la plus-value plus forte en cas de revente du bien.
Dans le cadre d'une option à l'impôt sur le revenu, les bénéfices sont imposés entre les mains des associés qui peuvent déduire certaines dépenses des revenus imposables.
Malgré d'indéniables avantages, la SCI peut présenter certains inconvénients, il est donc important de consulter au préalable son notaire, chaque situation devant faire l'objet d'une étude adaptée et d'une rédaction sur mesure.
quels sont les cas où la SCI se justifie parfaitement ?
Sophie ARPAILLANGE : La SCI est parfaitement utile et adaptée dans divers cas, elle peut être un outil pour se constituer un patrimoine, pour l'optimiser ou encore pour réduire son imposition.
Elle convient parfaitement dans le cadre de la gestion du patrimoine immobilier professionnel.
Le chef d'entreprise évitera d'inclure son patrimoine immobilier au sein de sa société d'exploitation et constituera pour ce faire une SCI.
Cette dernière réalisera l'acquisition du bien immobilier moyennant un prêt dont les échéances seront couvertes en tout ou partie par les loyers versés par sa société d'exploitation. À terme, il aura constitué un patrimoine soustrait du gage direct des créanciers en cas de difficulté, mais attention tout de même à la responsabilité personnelle de l'exploitant.
Il aura pu ainsi optimiser tant l'exercice de son activité professionnelle que la constitution de son patrimoine personnel. De plus, en optant pour un régime fiscal adapté, il pourra également optimiser sa fiscalité. Elle est également un excellent outil pour les acquisitions à plusieurs, afin d'assurer une gestion plus souple… au prix d'une solidarité plus grande. La SCI peut être parfaitement adaptée dans le cadre d'un investissement immobilier, financé par emprunt, avec une volonté de transmission.
Quel bénéfice pour la transmission des biens ?
Emmanuelle COIFFARD : Dans le cas où il est prévu un achat immobilier financé par un emprunt bancaire, la SCI peut permettre d'optimiser la fiscalité de la transmission. En effet, ce n'est plus le bien immobilier qui est donné mais bien les parts de la société. La valeur de ces parts étant estimée compte tenu de l'actif social, à savoir la valeur des biens détenus, mais également déduction faite du passif de la société, notamment le montant restant dû de son emprunt, les parts peuvent avoir une valeur bien moindre que celle de l'immeuble et permettre une transmission moins onéreuse.
La latitude laissée par la rédaction des statuts permet aux parents créateurs de la société de transmettre leur patrimoine via des parts de société à leurs enfants tout en désignant dans ces mêmes statuts, en qualité de co-gérant ou de gérant de substitution, celui d'entre eux le plus à même de gérer ce patrimoine après eux.
De par la rédaction de ses statuts, la SCI va permettre de contrôler l'entrée de nouveaux associés dans la société, et notamment les héritiers. Les statuts pourront être rédigés de façon très ouverte en permettant l'entrée automatique de nouveaux associés ou, au contraire, de façon plutôt fermée soit en prévoyant une entrée sous réserve de l'accord des associés existants, soit en excluant l'entrée des héritiers dans la société contre une indemnisation. Tout comme une détention en nom propre, la SCI peut tout à fait faire l'objet d'un démembrement de propriété. Le donateur peut conserver l'usufruit des parts sociales et donc les revenus tout en ayant transmis ses biens. Toutefois, il est important là encore que les statuts soient bien rédigés pour permettre à l'usufruitier de conserver l'intégralité des revenus de la société.
Que nous conseillez-vous pour procéder à sa constitution ?
Benoît MEURET-CADART : Avant toute constitution de société, il est important en premier lieu d'avoir bien réfléchi à son projet immobilier et au but recherché. En effet, il convient de bien définir dès le départ qui seront les associés afin de prévenir toute mésentente. L'avantage de la SCI est qu'elle peut évoluer au gré des besoins, c'est la SCI qui va s'adapter au projet et non l'inverse. Il faut bien entendu accorder une place très importante à la rédaction des statuts, attention aux clauses toutes faites qu'il est possible de trouver sur internet. Nous vous conseillons donc de recourir à votre notaire pour être bien conseillé et accompagné dans cette démarche.
Propos recueillis le 8 avril 2024
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