Successions internationales : alerte à la bombe !

Le 17 août 2015, un règlement européen va bouleverser le droit des successions. Si vous possédez un bien à l’étranger, vivez ailleurs que dans votre pays d’origine ou bénéficiez d’une double nationalité, consultez votre notaire ! Denis-Pierre Simon, notaire, président du Centre national de Droit européen nous en dit plus.
Que va-t-il se passer le 17 août 2015 ?
Me SIMON : L’Europe va tenter d’unifier sa façon de faire en matière de successions ! Aujourd’hui, il y a différents systèmes de transmission des biens selon les pays, qui “s’additionnent” les uns aux autres. Avec la réforme, ce sera la loi de la résidence habituelle qui s’appliquera pour tous les biens.
Prenons l’exemple d’un Français qui vit en France, y a sa maison, mais possède également une maison de famille en Italie. S’il décède avant le 17 août, tous ses biens seront transmis à ses héritiers selon la loi française, à l’exception de sa maison en Italie qui sera remise à ses héritiers selon la loi italienne. À partir du 17 août, même la maison en Italie sera transmise aux héritiers selon la loi française !
Cela paraît plus simple.
Quels sont les dangers de cette loi ?
Me SIMON : Il y a des “effets secondaires” beaucoup plus pervers ! En effet, cette loi n’a pas harmonisé la manière de désigner les héritiers.
Or, dans certains pays, la loi ne protège pas les enfants, mais favorise l’époux (ou l’épouse) qui survit. On dit alors que rien n’est “réservé” aux enfants : on peut donc les déshériter ! Aujourd’hui, un Français vivant en Angleterre et ne possédant des biens qu’en Angleterre peut déshériter ses enfants ! Avec cette nouvelle loi, il suffira d’installer sa résidence habituelle dans un pays où les enfants ne sont pas protégés, pour réduire à néant leur part.
Il est fort possible que de nombreux enfants essaient de se défendre devant les tribunaux, par exemple, sur les biens situés en France, pays qui connaît cette “réserve héréditaire” !
Quels conseils donneriez-vous à nos lecteurs, à quelques mois de l’entrée en vigueur de ce nouveau règlement ?
Me SIMON : De se rapprocher de leur notaire pour s’informer sur cette nouvelle loi, au regard de la situation personnelle de chacun. Surtout si un élément international existe. Il y a des précautions à prendre.
Un exemple pour vous convaincre : imaginons que votre fils parte en Chine pour entamer sa carrière et y épouse une chinoise. Savez-vous que la maison de campagne, dont vous avez donné une part à votre fils, en vous réservant l’usufruit, ne peut plus être vendue sans l’autorisation de votre belle-fille chinoise ? Qu’adviendrait-il si elle disparaissait dans le fin fond de la Chine après s’être séparée de votre fils ?
Aujourd’hui, le recours au notaire a permis de sauver la paix dans beaucoup de familles. D’où la nécessité de le consulter avant l’entrée en vigueur de ce nouveau règlement !
Propos recueillis par Valérie Ayala ■
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