Mineur associé d'une SCI
Attraits et précautions

La société civile immobilière (SCI) est une bonne formule pour devenir propriétaire à plusieurs. Elle permet aussi de simplifier la gestion et la transmission du bien possédé en commun. Mais comment cela se passe-t-il en présence d'un mineur ? Me Romain VIGNAU, notaire à Villenave d'Ornon, nous éclaire sur ce point.
Quels avantages y a-t-il à créer une société civile immobilière ?
La SCI est une société bien connue du grand public. Outil de gestion patrimonial et de transmission, la SCI séduit et attire. Si le plus souvent, l'entrée d'un mineur au sein d'une SCI résulte d'une volonté bien précise des parents, cette situation peut également et malheureusement être subie suite au décès d'un parent titulaire de parts sociales. La SCI est une structure qui présente de nombreux avantages à l'effet d'organiser la gestion du patrimoine d'un mineur et la transmission de ses biens à ses enfants. Il n'en demeure pas moins que certaines précautions doivent être prises. En effet, la minorité de certains associés soulève des interrogations tant lors de la constitution qu'au cours de la vie de la société.
Peut-on constituer une SCI avec un mineur ?
Le projet est ici de réaliser l'achat d'un bien immobilier en y associant ses enfants mineurs. Ce montage s'effectue généralement dans un objectif de transmission tout en facilitant la gestion des biens de l'enfant. Comme toute société, il conviendra de rédiger des statuts, faire des apports pour constituer le capital social, effectuer les annonces légales obligatoires et déposer un dossier complet auprès du Greffe du Tribunal de commerce.
Si rien ne s'oppose à ce qu'un enfant mineur soit associé, même majoritaire d'une SCI, il ne peut naturellement en être le gérant. Le simple accord des parents suffit pour réaliser un apport en numéraire, condition essentielle pour prétendre à la qualité d'associé. Au contraire, l'apport d'un bien immobilier appartenant au mineur, par suite de donation ou de succession, nécessitera quant à lui d'obtenir l'accord préalable du juge des tutelles. Il devra également être apporté un soin particulier à la rédaction des statuts en cas de démembrement de propriété, les enfants étant nus-propriétaires des parts sociales sous l'usufruit de leurs parents. Les clauses relatives à la participation aux décisions et à la répartition des bénéfices devront notamment être adaptées.
Comment se passe la gestion de la SCI en présence d'un mineur ?
Du fait de sa minorité, l'enfant n'a pas de capacité juridique, il ne pourra pas prendre part aux votes lors des assemblées générales et sera représenté par ses parents lors des décisions qui seront prises. Tous les documents seront également signés par ses représentants qui devront naturellement respecter les intérêts du mineur. Il ne faut pas oublier que détenir un bien immobilier avec ses enfants via une SCI impose néanmoins de réaliser certaines formalités. Il faut tenir une comptabilité, constater les apports en compte courant et remplir les déclarations fiscales, sous peine que certains créanciers invoquent la fictivité de la société.
Et au niveau du financement, est-ce que cela aura des conséquences ?
La SCI peut souscrire un emprunt bancaire même si un de ses associés est mineur, et cela sans avoir à solliciter l'autorisation du juge des tutelles. Toutefois, le mineur associé sera responsable, comme tout associé, à hauteur de sa participation dans le capital social et ce de manière indéfinie. S'il est possible de prévoir des clauses statutaires limitant sa responsabilité, il sera plus prudent de solliciter de l'établissement bancaire qu'il renonce à poursuive les enfants mineurs. Or, une telle renonciation n'est pas toujours chose aisée à obtenir.
Comment cela se passe-t-il en cas de vente d'un bien appartenant à la SCI ?
Ici encore, les parents, administrateurs légaux, représentent l'associé mineur lors du vote décidant l'opération. La vente est réalisée par la SCI dont le mineur est associé, et non directement par le mineur lui-même. De ce fait, aucune autorisation n'est à demander au juge des tutelles. Il faudra tout de même veiller à l'absence d'opposition d'intérêts entre les parents et l'enfant. À défaut, la prudence recommande de solliciter auprès du juge la nomination d'un administrateur ad hoc, qui aura pour mission de protéger l'intérêt du mineur.
En quoi la SCI permet-elle d'optimiser la transmission de son patrimoine ?
La SCI est un moyen de transmettre son patrimoine immobilier de manière plus souple. D'une part, en cas de bien immobilier unique non partageable, la SCI peut être le moyen d'éviter l'application future du régime de l'indivision entre les héritiers. En cas de patrimoine immobilier à usage locatif, la SCI permettra également de désigner dans le futur un enfant devenu majeur comme gérant, lequel pourra gérer et administrer seul et de manière plus simple le patrimoine immobilier familial. D'autre part, en s'associant avec ses enfants mineurs, la SCI permet d'optimiser la transmission de son patrimoine immobilier. Chaque parent peut actuellement transmettre par donation des parts sociales pour une valeur de 100 000 euros, et cela sans fiscalité. Cet abattement bénéficie à chaque enfant et se renouvelle tous les 15 ans. Cette structure permet ainsi une meilleure répartition de son patrimoine entre les descendants et un échelonnement progressif de la transmission. Cette transmission s'effectuera le plus souvent en démembrement de propriété, les parents conservant l'usufruit des parts sociales leur permettant ainsi de continuer d'occuper l'immeuble ou de percevoir les loyers. Mais attention cette fois à l'abus de droit fiscal. En effet, un tel abus est constitué si l'opération a pour motif principal d'éluder ou d'atténuer la fiscalité. Pour éviter ce risque, un tel montage doit ainsi être guidé par un véritable projet familial.
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